décembre 11, 2023

La perte de certaines batailles permet d’envisager de gagner la guerre

Le scenario qui vient de se dérouler dans les scrutins de la quinzaine écoulée permet paradoxalement d’envisager la suite du combat contre les fusions avec un optimisme renouvelé.

 

Prenons le cas de Belmont-Broye, « au hasard »…

 

Ce qui vient de se passer dans la fusion de Domdidier et de ses 3 voisines va profondément nourrir les réflexions pour les années à venir.

Evidemment,  à courte vue, le résultat est décevant et il faut reconnaître que la perte de 4 entités communales est une nouvelle pierre dans un jardin démocratique déjà bien saccagé.
Premièrement, et il est important de le relever, ce projet de fusion concernant les communes de Domdidier, Dompierre, Léchelles et Russy est exemplaire du lockout total par la presse d’un débat démocratique fondamental.

Le résultat avec les votes OUI et les votes NON « dans une fourchette » dans la plus grande commune, Domdidier, sans pratiquement aucun écho dans la presse des arguments exprimés contre la fusion, démontre un sérieux problème dans l’information objective de la population. Le manque d’intérêt évident pour une analyse objective des thèses en présence, même si l’une n’est défendue publiquement que par « un opposant solitaire qui sort du bois » (cf l’art. de La Liberté), est révélatrice du parti-pris de certains médias bénéficiant d’une situation de monopole. Le résultat final,  quasi à l’équilibre à Domdidier, montre pour le moins l’ancrage  de doutes sérieux dans la population, doutes que la presse ne s’est pas empressée, c’est le moins qu’on puisse dire, de rechercher pour en analyser les raisons.

D’un point de vue général, la présentation des fusions de communes sont toujours faites de manière condescendante, alors que l’argumentation contraire n’est quasiment jamais développée dans les médias.
Est-ce faute de combattants ? Certainement pas au point de laisser entendre qu’ils soient aussi rares que le loup blanc au milieu de nos campagnes. On peut signaler à ce propos l’ostracisme, sous prétexte de collégialité, donc sont victimes les élus désireux d’exprimer publiquement leur opposition à des processus qu’ils pourraient considérer comme anti-démocratiques.
Est-ce faute de faits objectivement suffisamment scandaleux pour qu’ils soient débattus publiquement ? Quand une Conseillère d’Etat, un Préfet, des syndics et la presse passent comme chat sur braise sur une procédure légale non respectée, on est en droit de se poser des questions concernant ce qui est véritablement en jeu derrière ces silences complices.
Est-ce faute d’arguments à discuter ? Ceux-ci ne sont pas si nombreux qu’on n’en puisse pas faire le tour: les principaux, les mêmes toujours mis en avant, tiennent sur les dix doigts des deux mains.
Ÿ
Va-t-on réellement être plus forts ?
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Va-t-on réellement  améliorer les prestations offertes aux citoyens ?
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Va-t-on  maintenir une fiscalité attractive ?
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Va-t-on garder en main notre avenir ?
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Va-t-on renforcer notre identité communale ?
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Va-t-on trouver plus de candidats aux fonctions publiques ?
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Va-t-on tenir les promesses que l’ont fait pour convaincre ?
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Etc.

Deuxièmement, il faut commencer par le reconnaître, Belmont-Broye redonne espoir aux tenants des fusions de communes qui voyaient les échecs s’accumuler ou, du moins, les projets de fusion connaître de plus en plus de défections, notamment dans le canton de Fribourg, « pionnier » sur lequel les yeux des autres cantons sont rivés.

Reste que la manière dont cette fusion a été arrachée à la population en dit long sur les moyens à mettre en oeuvre pour obtenir une acceptation de ces modifications institutionnelles aux collectivités locales et donne, paradoxalement, beaucoup d’espoir pour stopper ces hold-ups anti-démocratiques.

Sans revenir en détail sur la LEFC (Loi relative à l’encouragement des fusions de communes), véritable moteur actuel des fusions, la compétence qui y est donnée aux exécutifs communaux d’engager un processus de fusion de leur propre chef sans en réferrer obligatoirement aux législatifs (Conseil Général ou Assemblée Communale) jusqu’au vote final sur une convention minimaliste à prendre ou à laisser, est déjà une incitation à se passer de l’avis de la population.

A ce niveau, Belmont-Broye a vraiment été « exemplaire », au point que toutes les demandes d’explication, de clarification ou, simplement, d’information faites, notamment à Domdidier par le Conseil Général, ont été systématiquement repoussées par le Bureau de fusion. Les informations sur la situation financière détaillée des quatre communes n’ont été données au Conseil Général que dans une séance informelle, à huis-clos et sur l’insistance de la Commission Financière du même Conseil. Quant aux couacs de communication ou de procédure de ce projet, ils sont si nombreux que désigner cette mascarade comme exemple à suivre relève du ridicule. Rapide bilan: pas de mise à disposition spontanée (sur le site par ex.) du Rapport final de fusion – en fait il n’y a pas de Rapport !! –  , 3 synthèses des groupes de travail disponibles sur 6 une semaine avant le vote, convention standard ne reprenant aucune des promesses faites – soit une « coquille vide » –, convention non publiée dans la FO contrairement à la loi (Lco art 134d al4) – de quoi l’invalider auprès du Tribunal Cantonal (?) –, données chiffrées modifiées de publication en publication, date de signature du projet de fusion postérieure à la validation par l’Etat, présentations Powerpoint sur le site ne correspondant pas à ce qui a été montré aux citoyens, copié-collé de questions standards de pseudo-citoyens ( ?) sur le site, refus de l’argumentation contradictoire dans le matériel de vote, etc.

Que Belmont-Broye soit le bateau amiral des fusions fribourgeoises – ou le poisson-pilote de la fusion du « Grand Fribourg » – rien ne le confirme, mais ce qui est certain c’est que cette fusion est vraiment exemplaire des méthodes du hold-up.


Troisièmement, toutes ces considérations sur les procédés abjects qui concourent à faire glisser « subtilement » le pouvoir vers le haut de la pyramide ne doivent pas nous faire oublier de redonner le poids principal de notre opposition aux arguments essentiels de notre combat qui, s’il ne nous ont pas donné la majorité contre la fusion Belmont-Broye, nous la donnerons forcément à terme.

Récapitulons:

1.
Les fusions de communes sont une attaque frontale contre la démocratie directe et participative, seule à même de garantir le respect de chaque être humain.
2.
Les fusions de communes facilitent et participent à un mouvement centralisateur à tous les niveaux de la société, qui va à l’encontre des particularismes composant l’identité des communautés locales.
3.
Les fusions de communes sont une réponse passive à la mondialisation en route et une acceptation tacite de la nécessité de lever tous les obstacles à la dérégulation qu’elle induit.
4.
Les fusions de communes sont une étape significative de la soumission à la marchandisation de notre monde et à la conception purement économique de nos modes de vie.

Au travail ! Et pour le reste souhaitons tout de même bonne chance à Belmont-Broye, fille illégitime, mais fille tout de même.